Les filtres colorés
Lors de l'achat d'un télescope, l'astronome est parfois tenté de compléter son matériel par un jeu de filtres colorés. Ces filtres, généralement attractifs car peu chers, sont vantés par les boutiques pour leur faculté d'amélioration de l'image. Cependant, la déception est fréquente chez les astronomes débutants : alors qu'ils pensaient « booster » leur télescope, ils ne voient finalement qu'une image teintée d'une couleur vive. Bref, les retours d'expérience sont plutôt mitigés, du moins à première vue...
En astrophotographie, l'usage de filtres colorés apporte un gain important voire même inévitable dans de nombreux cas. En observation visuelle, en revanche, l'intérêt s'avère beaucoup plus restreint. Pourtant, ces filtres peuvent avoir quelques avantages, notamment lorsque l'on observe la Lune ou les planètes.
Pour observer un astre, l'astronome amateur utilise généralement un télescope sur lequel il insère un oculaire. En changeant d'oculaire, on peut ainsi faire varier le grossissement. L'objectif est d'accéder à de fins détails, ou alors d'observer la cible dans son environnement céleste. Dans les deux cas, la lumière récoltée par le télescope apporte de nombreuses « informations visuelles ». Or, l'œil humain n'est pas capable de tout percevoir simultanément car il n'est tout simplement pas assez « puissant ». Par exemple, les rayons infrarouge et ultraviolet ne sont pas accessibles ; seul un capteur artificiel (appareil photo, caméra...) révèlera ces longueurs d'onde. Dans le domaine visible, plutôt que d'observer simultanément la quasi-totalité du spectre lumineux, il est possible de ne sélectionner qu'une partie de la lumière. C'est là que les filtres colorés deviennent intéressants : en employant ce type de filtre, l'astronome peut jouer sur des nuances subtiles pour accéder à certains détails précis. Le plus souvent, l'usage de filtres colorés apporte une amélioration de l'image. Cette amélioration n'est pas spectaculaire. Parfois, elle est même difficile à voir. Pourtant, elle est suffisamment notable, et ce type d'expérience mérite d'être mené pour s'en rendre compte.
Que peut-on observer à l'oculaire avec un filtre coloré ?
Avant tout, il faut savoir que l'emploi de filtres colorés en observation visuelle ne permet pas d'observer plus de détails. Cela permet plutôt de mieux les apercevoir. Les informations transmises par la lumière demeurent subtiles et discrètes. En réalité, l'astronome ne fait que sélectionner des longueurs d'onde, à savoir celles qui font ressortir au mieux les informations auxquelles on veut accéder. Les longueurs d'onde « inutiles » sont alors bloquées ou rejetées.
Si vous êtes débutant, sachez que les filtres colorés ne font pas de miracle : les images obtenues au télescope ne seront pas plus lumineuses, et le pouvoir de résolution restera limité par les capacités de l'instrument. De plus, avec ou sans filtre, la qualité du ciel dépendra toujours des mêmes contraintes environnementales (pollution lumineuse, vent, humidité, température... ).
Chaque filtre coloré dispose d'une référence officielle et universelle. Il s'agit d'un numéro, parfois suivi d'une lettre. Ces références correspondent aux couleurs déterminées par la marque Kodak Wratten. Le tableau ci-dessous récapitule les principales références utilisées en astronomie (classement par numéro) :
A propos des filtres lunaires :
A proprement parler, les filtres lunaires ne sont pas tout-à-fait des filtres colorés. En effet, comme leur nom l'indique, les filtres lunaires ont pour objectif d'améliorer la visibilité de la surface lunaire ; leur fonctionnement est légèrement différent car ils laissent passer tout le spectre lumineux.
On distingue deux types de filtres lunaires : les filtres neutres « classiques » et les filtres polarisants.
Les filtres neutres réduisent la transmission de lumière. Cela évite d'être ébloui par la forte luminosité de la Lune. Plus le diamètre du télescope est grand, plus cet avantage est intéressant.
Les filtres polarisants, eux, permettent d'ajuster la polarisation de la lumière. L'observateur peut ainsi régler le pourcentage de lumière de manière précise (contrairement au filtre neutre dont le pourcentage de transmission reste fixe).
On notera qu'au fil de leur expérience, certains observateurs parviennent à se passer d'un tel accessoire.
Il n'est pas obligatoire d'employer un filtre lunaire. L'absence de ce filtre ne présente aucun danger. Effectivement, même si la Lune est éclairée par le Soleil, la lumière renvoyée par la Lune n'est pas assez puissante pour causer des dégâts à l'œil.
On peut également remarquer que les filtres neutres trouvent une utilité en observation solaire, notamment lorsque l'on observe à l'aide d'un prisme d'Herschel.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, lors des soirées brumeuses, la brume peut agir comme un filtre lunaire ! Il faut toutefois s'assurer que la brume soit suffisamment fine et légère pour que les détails lunaires apparaissent. Lorsque les conditions le permettent, il est même possible d'obtenir de très belles photos grâce à ce filtre naturel !
Comment choisir les filtres ?
Le choix d'un filtre peut se faire de manière tout-à-fait simple et logique : l'idéal est d'opter pour les filtres dont on a besoin ! Les filtres qui n'apportent aucune plus-value aux observations ne sont pas indispensables... Choisir ses filtres est donc une affaire personnelle et individuelle puisque cela dépend des pratiques de chacun. Certains observateurs n'emploient aucun filtre, tandis que d'autres n'hésitent pas à filtrer des longueurs d'onde bien précises ! Bref, c'est à chacun de déterminer ses besoins.
En terme de qualité optique, on trouve des lames en verre, en gélatine, et d'autres en plastique ou en matière composite. Mieux vaut privilégier le verre (de préférence mince plutôt qu'épais) car il offre une bien meilleure régularité ainsi qu'une transmission accrue.
Pour limiter les reflets, les filtres traités multi-couches sont préférables (traitement anti-reflet). Ils peuvent être teintés en surface, ou alors « dans la masse ». Dans les deux cas, la différence ne sera pas toujours perceptible en observation visuelle. Les filtres teintés uniquement en surface peuvent s'user plus rapidement, surtout s'ils sont d'un âge assez avancé, mais ce n'est pas systématique. Les techniques modernes de fabrication offrent aux astronomes le luxe de ne plus s'inquiéter à ce sujet !
La plupart des filtres existent au coulant 31,75 mm (1,25') et 50,8 (2'). Ces accessoires peuvent donc s'adapter sur la majorité des oculaires, renvois-coudés, roues à filtres et sur un certain nombre de lentilles de Barlow. Les modèles courants possèdent un filetage universel (on dit qu'ils sont « montés »). Pour les fixer, il suffit donc de les visser.
Les filtres utilisés en astrophotographie sont parfois « non-montés », c'est-à-dire qu'ils ne contiennent que la partie optique. Les astronomes doivent alors leur fabriquer une monture ou un clip de fixation. Les filtres non-montés peuvent être de forme ronde, mais aussi de forme carrée.
En définitive, on peut considérer que les filtres colorés apportent quelques avantages. Sans être indispensables, ils présentent tout de même un intérêt. Si vous hésitez à en acheter, essayez de contacter un observatoire ou un club d'astronomie pour avoir un aperçu en conditions réelles, lors d'une soirée d'observation. Cela vous permettra ainsi de vous faire une idée de la pertinence (ou non) de ce genre d'accessoire. Ce sont surtout vos pratiques sur le terrain et votre expérience qui détermineront l'éventuel besoin d'un filtre.
Avec ou sans filtres, Astropleiades vous souhaite d'agréables observations astronomiques !
- Article rédigé par Jean-Baptiste Faupin pour Astropleiades. -
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